TRAVAIL - Face à un secteur de l'emploi saturé, au point de générer des troubles sociaux comme à Kasserine en janvier dernier - certains chercheurs d'emplois diplômés tunisiens se redirigent vers le télémarketing, des centres d'appels à d'autres activités de "téléperformance".
Souvent considérée comme une solution "provisoire", certains travailleurs finissent par en faire un travail permanent... faute de mieux et par nécessité pécuniaire.
Une solution provisoire... qui dure
Khaled travaille dans la réception d'appels, plus précisément au service technique d'information.
"Notre travail est basé sur la réception d'appels, des particuliers vivant à l'étranger nous contactent et on les aide à régler un problème donné. C'est mieux que d'en émettre" raconte le jeune homme au HuffPost Tunisie.
Malgré son diplôme d'ingénieur, il travaille depuis un an et trois mois dans un Call-Center à Tunis. Pour une moyenne de 9 heures de travail par jour, avec une pause déjeuner d'une heure et deux pauses cafés de 15 minutes, il estime que sa position "est plus ou moins confortable".
"Je ne dirais pas que c'est de l'esclavagisme. Au début, c'est fatiguant. Il faut s'adapter. Après on prend certains repères", confie Khaled.
Titularisé "au bout d'un an de travail", la durée necessaire dans sa société pour "signer un contrat", il explique que son entreprise l'assure, lui verse une cotisation dans la Caisse nationale de Sécurité sociale (CNSS), et prend en charge son transport jusqu'à son domicile s'il reste au travail après 19 heures.
Le salaire mensuel dans ce type d'activité peut atteindre 800 dinars, "le salaire d'un ingénieur", de quoi donner envie à certains diplômés d'en faire leur métier.
"Des gens travaillent ici depuis sept ans, ils ont famille, maison et enfants...", raconte Khaled.
Cette solution du "provisoire qui dure" ne l'empêche pas de penser à chercher du travail dans son domaine d'étude, "ou peut-être que je vais reprendre le chemin de l'université", hésite-t-il.
Licenciement abusif...
Pour Yassine, le travail dans un centre d'appel n'a pas été tellement "aliénant":
Yassine a fini malgré tout par quitter l'entreprise. Payé 450 dinars au début, pour finir par atteindre 800 dinars, il juge que les heures de travail au centre d'appel n'étaient pas "flexibles".
Surveillant la qualité de travail des équipes du centre, il témoigne d'"une forme d'esclavagisme moderne. Tu n'es libre de rien, tout est épié, observé...".
Il explique qu'à la moindre faute, le travailleur est licencié. "C'était abusif", avoue-t-il.
Comme lui, beaucoup de diplômés qui n'ont pas trouvé d'emploi n'hésitent pas à postuler dans les centres d'appels. Yassine explique cela par "la facilité d'accès puisque généralement il n'y a pas de compétences requises si ce n'est de bien maîtriser une langue". Par ailleurs, la perspective d'évolution dans ce domaine, voire même l'ébauche d'une carrière, attirent les diplômés.
... et harcèlement moral
Rawen a travaillé à peine un mois dans un centre d'appel. L'atmosphère tendue, "la façon sournoise avec laquelle on m'a expliqué que je n'allais pas recevoir ma prime de 100 dinars", l'ont poussée à démissionner très rapidement.
Étudiante, elle a choisi de travailler parce qu'elle avait du temps libre et "puis c'était une façon de me faire de l'argent de poche".
Travaillant de 18 heures à 21 heures, pour 3 dinars de l'heure, à la fin du mois elle se retrouve avec un maigre salaire.
Elle décrit la pression constante que subissent les employés.
"Les superviseurs te harcèlent. Une fois on m'a crié dessus parce que j'ai été aimable avec un client. J'ai dérangé quelqu'un à 20 heures, j'essayais d'être aimable et on a essayé de m'expliquer que je ne devais pas l'être autant, que j'étais en tort!".
À cela, s'ajoute le quasi-chronomètrage instauré pendant les pauses. "Normalement après deux heures de travail, on avait le droit à dix minutes de pause, finalement on ne nous laissait pas les terminer".
Plongés dans une monotonie étouffante, les employés effectuent leurs tâches d'une manière robotique, les yeux fermés...
Ce harcèlement a poussé en 2013 un jeune homme travaillant à Téléperformance à faire une tentative de suicide. Il a décrit son acte comme un "geste de désespoir" face au "harcèlement de [sa] formatrice" et à son licenciement en cours.
La même année un article dans Le Parisien, plusieurs employés des centres d'appels de Téléperformance avaient manifesté devant le siège de la société à Tunis pour protester contre les conditions de travail et les maigres salaires perçus.
Souvent considérée comme une solution "provisoire", certains travailleurs finissent par en faire un travail permanent... faute de mieux et par nécessité pécuniaire.
Une solution provisoire... qui dure
Khaled travaille dans la réception d'appels, plus précisément au service technique d'information.
"Notre travail est basé sur la réception d'appels, des particuliers vivant à l'étranger nous contactent et on les aide à régler un problème donné. C'est mieux que d'en émettre" raconte le jeune homme au HuffPost Tunisie.
Malgré son diplôme d'ingénieur, il travaille depuis un an et trois mois dans un Call-Center à Tunis. Pour une moyenne de 9 heures de travail par jour, avec une pause déjeuner d'une heure et deux pauses cafés de 15 minutes, il estime que sa position "est plus ou moins confortable".
"Je ne dirais pas que c'est de l'esclavagisme. Au début, c'est fatiguant. Il faut s'adapter. Après on prend certains repères", confie Khaled.
Titularisé "au bout d'un an de travail", la durée necessaire dans sa société pour "signer un contrat", il explique que son entreprise l'assure, lui verse une cotisation dans la Caisse nationale de Sécurité sociale (CNSS), et prend en charge son transport jusqu'à son domicile s'il reste au travail après 19 heures.
"On a même un syndicat qui nous défend!", indique le trentenaire. "Ce n'est pas le paradis mais si on compare à d'autres centres d'appels, notre situation est correcte" assure-t-il.
Le salaire mensuel dans ce type d'activité peut atteindre 800 dinars, "le salaire d'un ingénieur", de quoi donner envie à certains diplômés d'en faire leur métier.
"Des gens travaillent ici depuis sept ans, ils ont famille, maison et enfants...", raconte Khaled.
Cette solution du "provisoire qui dure" ne l'empêche pas de penser à chercher du travail dans son domaine d'étude, "ou peut-être que je vais reprendre le chemin de l'université", hésite-t-il.
Licenciement abusif...
Pour Yassine, le travail dans un centre d'appel n'a pas été tellement "aliénant":
"En trois ans de travail, j'ai eu la chance d'être gradé très rapidement mais ça les arrangeait parce que je n'étais pas déclaré. Je me suis vite débarrassé du travail aliénant, je n'étais plus directement liés aux appels mais chargé de qualité."
Yassine a fini malgré tout par quitter l'entreprise. Payé 450 dinars au début, pour finir par atteindre 800 dinars, il juge que les heures de travail au centre d'appel n'étaient pas "flexibles".
"On travaillait les neuf heures réglementaires, on avait le droit à une heure de pause, mais il m'arrivait de rester jusqu'à vingt heures ou encore de travailler les week-ends".
Surveillant la qualité de travail des équipes du centre, il témoigne d'"une forme d'esclavagisme moderne. Tu n'es libre de rien, tout est épié, observé...".
Il explique qu'à la moindre faute, le travailleur est licencié. "C'était abusif", avoue-t-il.
Comme lui, beaucoup de diplômés qui n'ont pas trouvé d'emploi n'hésitent pas à postuler dans les centres d'appels. Yassine explique cela par "la facilité d'accès puisque généralement il n'y a pas de compétences requises si ce n'est de bien maîtriser une langue". Par ailleurs, la perspective d'évolution dans ce domaine, voire même l'ébauche d'une carrière, attirent les diplômés.
... et harcèlement moral
Rawen a travaillé à peine un mois dans un centre d'appel. L'atmosphère tendue, "la façon sournoise avec laquelle on m'a expliqué que je n'allais pas recevoir ma prime de 100 dinars", l'ont poussée à démissionner très rapidement.
Étudiante, elle a choisi de travailler parce qu'elle avait du temps libre et "puis c'était une façon de me faire de l'argent de poche".
Travaillant de 18 heures à 21 heures, pour 3 dinars de l'heure, à la fin du mois elle se retrouve avec un maigre salaire.
Elle décrit la pression constante que subissent les employés.
"Les superviseurs te harcèlent. Une fois on m'a crié dessus parce que j'ai été aimable avec un client. J'ai dérangé quelqu'un à 20 heures, j'essayais d'être aimable et on a essayé de m'expliquer que je ne devais pas l'être autant, que j'étais en tort!".
À cela, s'ajoute le quasi-chronomètrage instauré pendant les pauses. "Normalement après deux heures de travail, on avait le droit à dix minutes de pause, finalement on ne nous laissait pas les terminer".
Plongés dans une monotonie étouffante, les employés effectuent leurs tâches d'une manière robotique, les yeux fermés...
Ce harcèlement a poussé en 2013 un jeune homme travaillant à Téléperformance à faire une tentative de suicide. Il a décrit son acte comme un "geste de désespoir" face au "harcèlement de [sa] formatrice" et à son licenciement en cours.
La même année un article dans Le Parisien, plusieurs employés des centres d'appels de Téléperformance avaient manifesté devant le siège de la société à Tunis pour protester contre les conditions de travail et les maigres salaires perçus.
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