Pour ceux qui attendent encore d'un film qu'il soit un condensé de subtilité et de retenue, Mia Madre de Nanni Moretti est, peut-être, l'œuvre qu'il leur faut absolument voir.
Le 13ème long métrage du cinéaste italien a été apprécié pour sa sensibilité et sa justesse (mot-valise qui a fini par ne plus rien dire). Nous l'avons aimé parce qu'il parle de valeurs; de ces valeurs que le consumérisme et l'individualisme régnants sont en passe de ravager.
Cette érosion de l'humanisme et cette perte de repères (les grands récits de la modernité dont parlent les philosophes) sont des thèmes récurrents de l'univers de Moretti. Mais dans Mia Madre, une angoisse diffuse remplace le côté bon enfant qui distinguait ses œuvres précédentes.
Le film est l'histoire de Margaretha (rôle superbement campé par Margherita Buy), la cinquantaine, réalisatrice de films respectée et raisonnable et qui se trouve au centre d'un tourbillon: sa vie affective est à la dérive, le film qu'elle tourne, sur les luttes sociales contre les licenciements et l'achat des sociétés italiennes par les multinationales, peine à décoller et la mort annoncée de sa mère plombe encore plus son quotidien assez tristounet. Le tout sur fond de crise existentielle.
Les similitudes "biographiques" entre Margaretha (le personnage) et Moretti (le réalisateur) sont nombreuses.
La désillusion politique en est une. Ancien militant du Parti Communiste Italien, Moretti, peut faire siennes de nombreuses répliques et attitudes de la réalisatrice. Quand cette dernière met en question son travail en tant que réalisatrice dans le film, nous ne sommes pas loin de penser que c'est Moretti qui s'interroge sur l'avenir du cinéma, de l'art et de la culture face au déclin du sens et la montée au créneau des forces de l'argent.
Et en face, la mère alitée, mourante et qui vient hanter Margaretha jusque dans ses rêves, reste cet exemple d'abnégation et de sacrifice: c'est une vieille professeure de lettres qui croit au partage et à la transmission et qui porte une tradition où exigence ne rime pas avec narcissisme et orgueil mais avec don de soi et humilité.
Elle a des airs de mère- patrie, cette dame dont les enfants, pourtant adultes, ne parviennent pas à comprendre les choix qu'ils admirent et redoutent à la fois. Elle est le symbole d'une Italie cultivée, digne et modeste mais qui s'éteint doucement...
Les deux hommes qui entourent Marghareta entretiennent eux aussi un rapport infantile avec la valeur-travail. Le premier est son frère, joué par Moretti, qui est en long congé. Il a l'air en apesanteur. Sans prise sur le réel. Inconséquent. Sans projets. Le second est l'acteur américain qui joue le rôle de l'acheteur de l'usine (rôle tenu par John Turturro). Lui n'a plus envie de jouer. Il n'apprend pas son texte ou l'oublie. Il cabotine et provoque la réalisatrice déjà à cran!
Autant dire que même Hollywood a rompu avec la mémoire du grand cinéma!
Sombre Moretti? Vu l'état du monde (et du cinéma) on peut le comprendre. Auteur lucide, son œuvre, sophistiquée et exigeante, est en train de prendre une tournure où perlent des sentiments à fleur de peau.
L'ambiance demeure intimiste mais le rire et la distance cèdent de plus en plus souvent la place à un sourire teinté d'amertume. Gramsci ne parlait-il pas du pessimisme de l'intelligence?
Le 13ème long métrage du cinéaste italien a été apprécié pour sa sensibilité et sa justesse (mot-valise qui a fini par ne plus rien dire). Nous l'avons aimé parce qu'il parle de valeurs; de ces valeurs que le consumérisme et l'individualisme régnants sont en passe de ravager.
Cette érosion de l'humanisme et cette perte de repères (les grands récits de la modernité dont parlent les philosophes) sont des thèmes récurrents de l'univers de Moretti. Mais dans Mia Madre, une angoisse diffuse remplace le côté bon enfant qui distinguait ses œuvres précédentes.
Le film est l'histoire de Margaretha (rôle superbement campé par Margherita Buy), la cinquantaine, réalisatrice de films respectée et raisonnable et qui se trouve au centre d'un tourbillon: sa vie affective est à la dérive, le film qu'elle tourne, sur les luttes sociales contre les licenciements et l'achat des sociétés italiennes par les multinationales, peine à décoller et la mort annoncée de sa mère plombe encore plus son quotidien assez tristounet. Le tout sur fond de crise existentielle.
Les similitudes "biographiques" entre Margaretha (le personnage) et Moretti (le réalisateur) sont nombreuses.
La désillusion politique en est une. Ancien militant du Parti Communiste Italien, Moretti, peut faire siennes de nombreuses répliques et attitudes de la réalisatrice. Quand cette dernière met en question son travail en tant que réalisatrice dans le film, nous ne sommes pas loin de penser que c'est Moretti qui s'interroge sur l'avenir du cinéma, de l'art et de la culture face au déclin du sens et la montée au créneau des forces de l'argent.
Et en face, la mère alitée, mourante et qui vient hanter Margaretha jusque dans ses rêves, reste cet exemple d'abnégation et de sacrifice: c'est une vieille professeure de lettres qui croit au partage et à la transmission et qui porte une tradition où exigence ne rime pas avec narcissisme et orgueil mais avec don de soi et humilité.
Elle a des airs de mère- patrie, cette dame dont les enfants, pourtant adultes, ne parviennent pas à comprendre les choix qu'ils admirent et redoutent à la fois. Elle est le symbole d'une Italie cultivée, digne et modeste mais qui s'éteint doucement...
Les deux hommes qui entourent Marghareta entretiennent eux aussi un rapport infantile avec la valeur-travail. Le premier est son frère, joué par Moretti, qui est en long congé. Il a l'air en apesanteur. Sans prise sur le réel. Inconséquent. Sans projets. Le second est l'acteur américain qui joue le rôle de l'acheteur de l'usine (rôle tenu par John Turturro). Lui n'a plus envie de jouer. Il n'apprend pas son texte ou l'oublie. Il cabotine et provoque la réalisatrice déjà à cran!
Autant dire que même Hollywood a rompu avec la mémoire du grand cinéma!
Sombre Moretti? Vu l'état du monde (et du cinéma) on peut le comprendre. Auteur lucide, son œuvre, sophistiquée et exigeante, est en train de prendre une tournure où perlent des sentiments à fleur de peau.
L'ambiance demeure intimiste mais le rire et la distance cèdent de plus en plus souvent la place à un sourire teinté d'amertume. Gramsci ne parlait-il pas du pessimisme de l'intelligence?
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