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Tunisie-révolution des femmes: Par où commencer?

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De prime à bord, la femme tunisienne semble libre et émancipée ensuite, les lois sont assez libératrices, jouant en sa faveur mais la réalité est toute autre.

Dans son quotidien est-elle vraiment égale à l'homme?

En effet, nous avons grandi avec une idée claire en tête, la femme tunisienne est libre, forte et elle dépasse de loin les femmes arabes en question de droits et de libertés mais de quelles libertés parlons nous?

Entre théorie et réalité, le gouffre se creuse

Il va de soit que par rapport au reste des pays musulmans, la tunisienne l'emporte en matières de droits, disposant de l'un des Codes du statut personnel les plus progressistes de la région.

Cela étant dit, certaines dispositions discriminatoires subsistent. Par exemple, même lorsque la garde des enfants est attribuée à la mère, c'est le père qui conserve les attributions de tutelle juridique.

En matière d'héritage, les filles ont une part inférieure à celle de leurs frères, et parfois même à celle d'autres membres de la famille de sexe masculin, tels des cousins.

L'article 58 du Code du statut personnel permet aux juges de donner la garde de l'enfant soit au père soit à la mère selon l'intérêt de l'enfant, mais ils peuvent interdire à la mère d'avoir la garde de ses enfants si elle est remariée. Cette restriction n'est pas applicable au père.

Plus encore, quid du principe de parité (article 46 de la Constitution), si seulement 12% de femmes étaient têtes de liste aux élections législatives de 2014? Quid de l'égalité en droit entre les citoyens et les citoyennes (article 21) lorsque l'inégalité dans le partage de l'héritage n'est pas remise en question? Ces écarts poussent à croire qu'il y a du pain sur la planche afin que l'égalité soit effective.

Si les libertés sont seulement celles de circuler, de divorcer, d'élever et garder ses enfants en cas de séparation avec le mari, de travailler et gagner un salaire égal à son collègue, je dis que celles-ci sont fondamentales et que le vrai combat ne fait que commencer.

Besoin urgent de définir une problématique

Le mal des femmes en Tunisie est du à l'absence de problématique sociale claire donc d'une feuille de route et d'une stratégie à suivre, la lutte se limite à des tweets, des posts facebook et des mini-manifestations, sans soubassements sociaux, rien de bien concret donc.

Non, ce n'est pas Bourguiba qui a "libéré" la femme tunisienne

La plupart de mes détracteurs feront une étrange grimace à la lecture de ce paragraphe, mais ceux qui pensent que c'est le leader Habib Bourguiba qui a "libéré" la femme tunisienne, ne connaissent pas vraiment l'histoire de la Tunisie ou du moins confondent une bonne partie de l'histoire bien que cet homme ait beaucoup donné pour libérer son pays la Tunisie, et bien qu'il soit un leader sans égal, ce n'est point le libérateur de la femme comme le présentent certains, Bourguiba a écouté les penseurs de l'époque tel que Tahar Haddad qui eux ont repensé la femme et la société.

Rappelons que dès son jeune âge, Tahar Haddad, ancien élève de l'Université de la Zeitouna milita pour l'émancipation de la femme tunisienne. En 1930 il publia son ouvrage "Notre femme dans la charia et la société". Ses pensées soulevèrent certes des huées d'indignation et de refus de la part des conservateurs.

Mais en 1956, les idées de Tahar Haddad furent reconnues lors de la promulgation du Code du statut personnel. Depuis, le principe d'égalité entre hommes et femmes sur le plan de la citoyenneté et devant la loi fut expressément affirmée dans les textes législatifs tunisiens.

Pourtant, le vrai combat des femmes n'a jamais eu lieu, les lois protectrices et favorables ont été établies pour les femmes, elles en ont hérité, comme eu par appendice, c'est pour cela que le combat est tergiversé.

Les lois bien qu'avant-gardistes, ne suffisent pas, on ne peut parler de liberté des femmes sans un changement de mentalités, un changement radical dans le système de l'éducation nationale.

Combien de générations faudra-t-il encore pour atteindre cette maturité sociale qui permettra à la femme et l'homme d'être réellement libres et égaux?

Les ennemis du féminisme sont les féministes eux-mêmes, dans leur conflit interne et leur approche frontale et en Tunisie c'est pire, ce sont les hommes qui ont décidé du sort des femmes et eux qui leur ont insaturé des lois libératrices et égalitaires.

La Tunisie prône l'ouverture tout en restant attachée à ses origines arabo-musulmanes ce qui n'est pas vraiment possible en matière d'égalité, le moment est venu de lancer un vrai dialogue social sur la question de la femme, des droits, de la religion et des mentalités et de créer un modèle original qui est unique à la Tunisie en matière des droits des femmes.

Gouverner le féminisme?

Comme l'explique Isabelle Ferreras, sociologue, professeure à l'Université de Louvain et chercheuse associée à Harvard, l'entreprise fait partie des institutions qui occupent conditionnent notre quotidien et où la démocratie ne bat pas son plein.

En Tunisie, les relations d'entreprise n'ont pas changé depuis la révolution, elles nous rappellent encore l'ancien régime. Certains partenaires y "sont plus égaux que d'autres".

L'entreprise tunisienne reste le lieu de la "rationalité instrumentale" et de discrimination sexuelle malgré la convention sur la lutte contre la discrimination dans le travail (ratifiée en 1959) et de harcèlement moral et sexuel.

Si l'on veut refonder le contrat social tunisien, il faut que les propriétaires du capital nouent un nouveau compromis avec les "investisseurs en travail" comme les appelle Ferreras et qu'ils y intègrent d'office, la femme.

Le contrat social tunisien ne prévoit pas une grande place aux femmes et nos syndicats sont très peu représentatifs de cette dernière. Avoir une femme à la tête du patronnât (Mme Ouided Bouchemaoui) reste insuffisant, il reste beaucoup de travail à faire pour réaliser l'égalité des sexes dans l'entreprise.

Et c'est là d'ailleurs, que le vrai combat des femmes doit s'opérer, qu'il doit réussir et aller contaminer ainsi, les autres secteurs.

Ce qu'il faut c'est plus de femmes dans les instances décisionnelles et dans l'exécutif et surtout moins de plafond de verre.

Affaire à suivre...

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