Cher Mission Universitaire de Tunisie en Amérique du Nord (MUTAN), Ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique et autres ...
Il y a deux ans de cela, j'ai été acceptée pour effectuer un stage dans un laboratoire de l'Institut National de la Recherche Scientifique-Institut Armand Frappier (Montréal, QC, Canada).
Ce stage est venu comme suite logique d'un stage de master 2 que j'ai effectué aussi au Canada.
Je suis tombée amoureuse des laboratoires équipés, de la générosité des chercheurs en temps et argent et de l'adulation qu'ont ces gens pour la science (jusqu'à une certaine limite bien sûr, malgré bien des obstacles budgétaires de la part du gouvernement comme partout ailleurs dans le monde).
Je disais donc, je suis revenue à Montréal en espérant continuer un Doctorat en biologie, vu que j'étais détentrice d'un master professionnel en Génie Biologique. Je finançais donc personnellement les deux stages (vu que pour le premier je n'étais pas éligible à une bourse d'alternance, et le deuxième était probablement considéré comme un caprice) et j'accourais bras ouverts et fougue pendante aux lèvres.
Au bout de 6 mois de travail, mon directeur de recherche, qui en cours de route a eu l'humanité de me rémunérer, me propose de postuler pour une bourse Tuniso-Canadienne pour entamer un Doctorat et continuer à travailler sur le projet déjà avancé que je menais pendant le stage.
Munie d'une double lettre de recommandation (une du directeur de recherche, l'autre du directeur de l'INRS) j'envoyais donc fièrement mon dossier à la commission d'évaluation.
Bref, je dépose donc ma candidature, munie de mes lettres, de mon master professionnel et de mon ambition de devenir chercheur.
Quelle ne fut la surprise, lorsque deux jours avant la commission, le téléphone sonne au bureau de mon directeur de recherche pour lui annoncer que mon dossier a été retiré de la course aux bourses.
Deux jours, avant la commission, une secrétaire a jugé que je ne correspondais pas aux critères de sélection de la bourse. Deux jours avant la commission, malgré le soutien du directeur de l'INRS-IAF, malgré le fait que l'INRS-IAF m'ait déjà acceptée en Doctorat, malgré le passage outre le fait que j'aie un master professionnel stipulé textuellement par la direction de l'INRS, la Tunisie m'annonçait qu'elle n'en avait rien à foutre, qu'un master professionnel n'était que ça, et que je n'avais pas le droit à la recherche.
En résultat, je refais une maîtrise de recherche, encore deux années et plus du tout l'envie de faire de Doctorat.
En résultat, je garde en moi la rancune envers le directeur de la MUTAN, qui lors d'un rendez-vous m'a clairement dit: "Vous n'avez aucun droit de contester les décisions, vous n'aviez qu'à choisir un autre cursus. Et de toute façon vous nous êtes tous redevables, redevables de ce que vous êtes à la Tunisie".
NON Monsieur, je n'aurais jamais pu choisir un autre cursus.
NON monsieur, je n'ai pas reçu de formation ni d'informations quant aux choix qu'on doit faire après le Bac, mis à part un livret débitant les universités et facultés tunisiennes, avec des chiffres et des scores.
NON monsieur je ne suis redevable qu'à mes parents qui se sont privés pour me financer mes "caprices" et folies de grandeur scientifique.
NON je ne reviendrais pas en Tunisie, pas avant d'avoir les moyens d'écraser la racaille qui nous sert de guide et qui décide pour les autres de leur avenir.
Pourquoi j'écris cela aujourd'hui? Au bout de 2 années? Parce qu'aujourd'hui une amie à laquelle vous avez refusé la bourse de maîtrise il y a deux ans alors qu'elle était majeure de sa promotion en licence, s'est vue refuser la bourse de Doctorat à l'INRS-IAF alors qu'elle possède une maîtrise .. de l'INRS-IAF!
Oui Monsieur, votre commission refuse pour Dieu seul sait quelle raison, à quelqu'un qui s'est donné les moyens de réussir malgré vos bâtons dans nos roues, et avec l'aide de professeurs étrangers qui acceptent parfois de nous financer (à leur risques et périls vous devez vous dire).
Oui Monsieur, vous avez refusé une bourse de Doctorat à quelqu'un qui présente les critères d'obtention et bien plus.
J'attendrais d'entendre votre version cette fois, quelles bêtises vous allez débiter, quelles excuses vous allez étaler et quelles menaces vous allez proférer.
Nous sommes venus ici avec l'espoir et la motivation de rentrer rendre la pareille et être comme ces quelques profs qui ont cru en nous, qui nous ont écrit nos lettres de recommandations, redirigés, soutenus, formés. Ces gens auxquels on veut ressembler, dont on veut emboiter le pas.
Je sais que ça sonne cliché à vos oreilles ou que vous vous dites que je sors la carte du mélodrame, mais non. J'ai connu pour ma part des profs détenteurs de dizaines de brevets d'inventions (Pr Ismail Fliss, ULaval, QC), de prix internationaux (Dr Sarah Ben Mbarek, détentrice de prix de la meilleure recherche scientifique 2012,Netherlands), des collaborateurs qui de part les océans nous donnaient des conseils sur nos travaux pratiques par mail (Dr Riadh Hammami, ULaval, QC) et bien d'autres.
Je ne citerais pas les profs que j'ai eu à Tunis et qui ont passé leur vie et carrière à essayer de trouver des solution pour contourner votre système, décrocher des fonds pour nous faire des sorties dans des parcs ou autre, batailler pour implanter des formations diplomantes.
NON je ne dirais rien de plus, je ne vous apprend rien sur vos échecs. Messieurs, je ne vais pas vous rappeler votre incompétence et votre hypocrisie.
Vous nous haïssez, quand on réussit, quand on a de la fougue, quand on aime tellement ce qu'on fait qu'on en vient à vouloir changer les choses. Ca vous énerve, nous petits morveux qui ne savons rien de la vraie vie, on se pose trop de questions, on gratouille les injustices pour comprendre les motivations d'autant de personnes dont le seul but semble est de nous empêcher de grandir, faire honneur au pays.
C'est un schéma classique, votre haine envers ceux qui partent ne fait qu'alimenter une haine qui nous est nouvelle, celle du pays, des gens du pays, des petits boiteux de la morale qui se donnent le droit de décider pour nous et de nous balancer après "vous nous êtes redevables".
Redevables de quoi? Tout ce que je sais, c'est que si je devais revenir un jour, ce serait quand j'aurais assez de ressources morales pour passer au dessus de vous tous, de votre système, de vos ministères et de vos commissions. Je ne reviendrais que parce que le jasmin et mes parents m'auront manqué. Mais pas moins qu'avec une poigne de fer pour vous déraciner de vos chaises.
Messieurs les décideurs.
Bien Cordialement,
Une simple détentrice de 2 maitrises en Biologie,
Boursière d'excellence de la Fondation Armand-Frappier 2015-2016 (comme quoi ça paye !).
Il y a deux ans de cela, j'ai été acceptée pour effectuer un stage dans un laboratoire de l'Institut National de la Recherche Scientifique-Institut Armand Frappier (Montréal, QC, Canada).
Ce stage est venu comme suite logique d'un stage de master 2 que j'ai effectué aussi au Canada.
Je suis tombée amoureuse des laboratoires équipés, de la générosité des chercheurs en temps et argent et de l'adulation qu'ont ces gens pour la science (jusqu'à une certaine limite bien sûr, malgré bien des obstacles budgétaires de la part du gouvernement comme partout ailleurs dans le monde).
Je disais donc, je suis revenue à Montréal en espérant continuer un Doctorat en biologie, vu que j'étais détentrice d'un master professionnel en Génie Biologique. Je finançais donc personnellement les deux stages (vu que pour le premier je n'étais pas éligible à une bourse d'alternance, et le deuxième était probablement considéré comme un caprice) et j'accourais bras ouverts et fougue pendante aux lèvres.
Au bout de 6 mois de travail, mon directeur de recherche, qui en cours de route a eu l'humanité de me rémunérer, me propose de postuler pour une bourse Tuniso-Canadienne pour entamer un Doctorat et continuer à travailler sur le projet déjà avancé que je menais pendant le stage.
Munie d'une double lettre de recommandation (une du directeur de recherche, l'autre du directeur de l'INRS) j'envoyais donc fièrement mon dossier à la commission d'évaluation.
Bref, je dépose donc ma candidature, munie de mes lettres, de mon master professionnel et de mon ambition de devenir chercheur.
Quelle ne fut la surprise, lorsque deux jours avant la commission, le téléphone sonne au bureau de mon directeur de recherche pour lui annoncer que mon dossier a été retiré de la course aux bourses.
Deux jours, avant la commission, une secrétaire a jugé que je ne correspondais pas aux critères de sélection de la bourse. Deux jours avant la commission, malgré le soutien du directeur de l'INRS-IAF, malgré le fait que l'INRS-IAF m'ait déjà acceptée en Doctorat, malgré le passage outre le fait que j'aie un master professionnel stipulé textuellement par la direction de l'INRS, la Tunisie m'annonçait qu'elle n'en avait rien à foutre, qu'un master professionnel n'était que ça, et que je n'avais pas le droit à la recherche.
En résultat, je refais une maîtrise de recherche, encore deux années et plus du tout l'envie de faire de Doctorat.
En résultat, je garde en moi la rancune envers le directeur de la MUTAN, qui lors d'un rendez-vous m'a clairement dit: "Vous n'avez aucun droit de contester les décisions, vous n'aviez qu'à choisir un autre cursus. Et de toute façon vous nous êtes tous redevables, redevables de ce que vous êtes à la Tunisie".
NON Monsieur, je n'aurais jamais pu choisir un autre cursus.
NON monsieur, je n'ai pas reçu de formation ni d'informations quant aux choix qu'on doit faire après le Bac, mis à part un livret débitant les universités et facultés tunisiennes, avec des chiffres et des scores.
NON monsieur je ne suis redevable qu'à mes parents qui se sont privés pour me financer mes "caprices" et folies de grandeur scientifique.
NON je ne reviendrais pas en Tunisie, pas avant d'avoir les moyens d'écraser la racaille qui nous sert de guide et qui décide pour les autres de leur avenir.
Pourquoi j'écris cela aujourd'hui? Au bout de 2 années? Parce qu'aujourd'hui une amie à laquelle vous avez refusé la bourse de maîtrise il y a deux ans alors qu'elle était majeure de sa promotion en licence, s'est vue refuser la bourse de Doctorat à l'INRS-IAF alors qu'elle possède une maîtrise .. de l'INRS-IAF!
Oui Monsieur, votre commission refuse pour Dieu seul sait quelle raison, à quelqu'un qui s'est donné les moyens de réussir malgré vos bâtons dans nos roues, et avec l'aide de professeurs étrangers qui acceptent parfois de nous financer (à leur risques et périls vous devez vous dire).
Oui Monsieur, vous avez refusé une bourse de Doctorat à quelqu'un qui présente les critères d'obtention et bien plus.
J'attendrais d'entendre votre version cette fois, quelles bêtises vous allez débiter, quelles excuses vous allez étaler et quelles menaces vous allez proférer.
Nous sommes venus ici avec l'espoir et la motivation de rentrer rendre la pareille et être comme ces quelques profs qui ont cru en nous, qui nous ont écrit nos lettres de recommandations, redirigés, soutenus, formés. Ces gens auxquels on veut ressembler, dont on veut emboiter le pas.
Je sais que ça sonne cliché à vos oreilles ou que vous vous dites que je sors la carte du mélodrame, mais non. J'ai connu pour ma part des profs détenteurs de dizaines de brevets d'inventions (Pr Ismail Fliss, ULaval, QC), de prix internationaux (Dr Sarah Ben Mbarek, détentrice de prix de la meilleure recherche scientifique 2012,Netherlands), des collaborateurs qui de part les océans nous donnaient des conseils sur nos travaux pratiques par mail (Dr Riadh Hammami, ULaval, QC) et bien d'autres.
Je ne citerais pas les profs que j'ai eu à Tunis et qui ont passé leur vie et carrière à essayer de trouver des solution pour contourner votre système, décrocher des fonds pour nous faire des sorties dans des parcs ou autre, batailler pour implanter des formations diplomantes.
NON je ne dirais rien de plus, je ne vous apprend rien sur vos échecs. Messieurs, je ne vais pas vous rappeler votre incompétence et votre hypocrisie.
Vous nous haïssez, quand on réussit, quand on a de la fougue, quand on aime tellement ce qu'on fait qu'on en vient à vouloir changer les choses. Ca vous énerve, nous petits morveux qui ne savons rien de la vraie vie, on se pose trop de questions, on gratouille les injustices pour comprendre les motivations d'autant de personnes dont le seul but semble est de nous empêcher de grandir, faire honneur au pays.
C'est un schéma classique, votre haine envers ceux qui partent ne fait qu'alimenter une haine qui nous est nouvelle, celle du pays, des gens du pays, des petits boiteux de la morale qui se donnent le droit de décider pour nous et de nous balancer après "vous nous êtes redevables".
Redevables de quoi? Tout ce que je sais, c'est que si je devais revenir un jour, ce serait quand j'aurais assez de ressources morales pour passer au dessus de vous tous, de votre système, de vos ministères et de vos commissions. Je ne reviendrais que parce que le jasmin et mes parents m'auront manqué. Mais pas moins qu'avec une poigne de fer pour vous déraciner de vos chaises.
Messieurs les décideurs.
Bien Cordialement,
Une simple détentrice de 2 maitrises en Biologie,
Boursière d'excellence de la Fondation Armand-Frappier 2015-2016 (comme quoi ça paye !).
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