Comme je suis expert en quelque chose (on l'est tous de toute façon), voici un retour sur l'indépendance de la Banque Centrale Tunisienne (BCT):
1- Pourquoi l'indépendance:
C'est une norme mondiale qui date surtout des années 70. Face au choc pétrolier et aux épisodes d'hyperinflation en occident, les recettes keynésiennes classiques n'ont pas marché. Des économistes ont conclu à l'existence d'un biais inflationniste qui résulte de la discrétion dans la conduite de la politique monétaire. Ça a donné lieu au plus bel article académique en économie ("rules rather than discretion" de Kydland et Prescott).
Accessoirement, les Banques centrales ont depuis acquis leur indépendance du pouvoir politique. En pratique, cela veut dire un mandat prédéfini pour le gouverneur et des objectifs préannoncés pour la banque, objectifs qui varient selon le pays (inflation targetting, stabilité de l'inflation ou stabilité de la croissance).
2- Aujourd'hui, c'est toujours le cas en théorie. En pratique cependant, les banques centrales ont eu toute la latitude pour s'écarter de ces objectifs strictes. Il suffit de voir le cas de la Banque Centrale Européenne et des nombreux écarts et entorses qu'ils ont fait à leur objectif et à leur règlement interne.
3- La loi d'indépendance de la Banque Centrale Tunisienne vient comme une mise à niveau et une harmonisation à des normes mondiales (pourtant dépassées en pratique).
Dans les faits, ses objectifs, ses prérogatives et ses moyens restent les mêmes (maîtrise de l'inflation, stabilité du change, du système bancaire et des moyens de paiement). Gageons aussi qu'en pratique, l'indépendance du pouvoir politique ne va pas remettre en cause le caractère pragmatique de la prise de décision au sein de la Banque Centrale Tunisienne puisque...cela fait partie de son mandat.
Précisions aussi qu'en matière de politique monétaire, et particulièrement en ce qui concerne le privilège du contrôle et de la création de la quantité de monnaie, le rôle de la BCT est selon moi relatif: les canaux de transmission vers l'économie réelle sont de toute manière limités dans une économie avec une proto-finance comme la notre.
Bref...tout ça pour dire que sur le plan strictement macroéconomique, cette affaire est un non-évènement.
4- Les réticences de certains députés quant à une loi prétendument dictée depuis l'étranger ne sont pas fondées, mais elles demeurent compréhensibles dans la mesure où nous n'avons pas encore fini de soigner les traumatismes de "Ahd el Amen" (Le pacte fondamental et de la Commission financière internationale de 1870.
5- Enfin, la manoeuvre partisane des députés de Afek lors du vote...ça c'est de l'excellente politique politicienne de la petite semaine.
1- Pourquoi l'indépendance:
C'est une norme mondiale qui date surtout des années 70. Face au choc pétrolier et aux épisodes d'hyperinflation en occident, les recettes keynésiennes classiques n'ont pas marché. Des économistes ont conclu à l'existence d'un biais inflationniste qui résulte de la discrétion dans la conduite de la politique monétaire. Ça a donné lieu au plus bel article académique en économie ("rules rather than discretion" de Kydland et Prescott).
Accessoirement, les Banques centrales ont depuis acquis leur indépendance du pouvoir politique. En pratique, cela veut dire un mandat prédéfini pour le gouverneur et des objectifs préannoncés pour la banque, objectifs qui varient selon le pays (inflation targetting, stabilité de l'inflation ou stabilité de la croissance).
2- Aujourd'hui, c'est toujours le cas en théorie. En pratique cependant, les banques centrales ont eu toute la latitude pour s'écarter de ces objectifs strictes. Il suffit de voir le cas de la Banque Centrale Européenne et des nombreux écarts et entorses qu'ils ont fait à leur objectif et à leur règlement interne.
3- La loi d'indépendance de la Banque Centrale Tunisienne vient comme une mise à niveau et une harmonisation à des normes mondiales (pourtant dépassées en pratique).
Dans les faits, ses objectifs, ses prérogatives et ses moyens restent les mêmes (maîtrise de l'inflation, stabilité du change, du système bancaire et des moyens de paiement). Gageons aussi qu'en pratique, l'indépendance du pouvoir politique ne va pas remettre en cause le caractère pragmatique de la prise de décision au sein de la Banque Centrale Tunisienne puisque...cela fait partie de son mandat.
Précisions aussi qu'en matière de politique monétaire, et particulièrement en ce qui concerne le privilège du contrôle et de la création de la quantité de monnaie, le rôle de la BCT est selon moi relatif: les canaux de transmission vers l'économie réelle sont de toute manière limités dans une économie avec une proto-finance comme la notre.
Bref...tout ça pour dire que sur le plan strictement macroéconomique, cette affaire est un non-évènement.
4- Les réticences de certains députés quant à une loi prétendument dictée depuis l'étranger ne sont pas fondées, mais elles demeurent compréhensibles dans la mesure où nous n'avons pas encore fini de soigner les traumatismes de "Ahd el Amen" (Le pacte fondamental et de la Commission financière internationale de 1870.
5- Enfin, la manoeuvre partisane des députés de Afek lors du vote...ça c'est de l'excellente politique politicienne de la petite semaine.
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